Pour illustrer ces principes, je vous propose plusieurs exemples concrets issus de situations régulièrement rencontrées par les fournisseurs de SaaS.
Exemple 1 : Fournisseur basé en France, client B2B en Allemagne
Imaginons que vous êtes une société, basée en France, qui édite une plateforme SaaS destinée à la gestion de projets. Votre client est une PME allemande disposant d’un numéro de TVA intracommunautaire valide. Vous facturez un abonnement mensuel de 2 000 euros. Du point de vue TVA, c’est un service B2B intracommunautaire. Conformément aux règles, vous ne facturez pas la TVA française, puisque la prestation est localisée en Allemagne. Le client allemand est censé autoliquider la TVA en Allemagne. Vous devrez indiquer la mention « Autoliquidation » (ou équivalent) sur votre facture, et vous reporter cette opération sur votre DEB (déclaration d’échange de biens) ou DS (déclaration des services) si cela est encore nécessaire selon la réglementation en vigueur. Ainsi, le fournisseur n’a pas à s’enregistrer en Allemagne, tandis que le client régularise sa TVA via sa déclaration nationale.
Exemple 2 : Fournisseur basé en France, client B2C en Espagne
This time, vous vendez un accès à un logiciel de montage vidéo en ligne à un étudiant espagnol qui l’utilise pour ses projets universitaires. Vous facturez 20 euros par mois en abonnement. Ici, nous sommes en B2C, et le service relève de la définition de service électronique. Depuis l’implémentation des règles sur la TVA des services électroniques, la TVA due est celle de l’Espagne, pays où réside le consommateur. Vous avez alors deux options : vous inscrire en Espagne pour déclarer et payer la TVA espagnole, ou opter pour le guichet unique OSS, qui vous permettra de déclarer ces ventes sous la TVA espagnole, via une plateforme unique dépendant de l’administration française. Si vous dépassez les seuils de vente fixés pour ces services dématérialisés ou si vous considérez qu’il est plus simple de tout déclarer via l’OSS, vous éviterez des démarches multiples dans chaque État membre. Ainsi, sur votre facture, vous préciserez la TVA espagnole, dont le taux standard est de 21 %, sauf modification légale.
Exemple 3 : Contrat SaaS + matériel en Italie
Vous proposez un package qui inclut un abonnement SaaS pour gérer l’inventaire d’un commerce italien, mais vous fournissez également un scanner de code-barres connecté, expédié depuis la France. Cette transaction se compose d’un service immatériel (le SaaS) et d’un bien matériel (le scanner). Du point de vue TVA, vous devrez distinguer la partie service, taxable dans le pays du client B2B (en l’occurrence l’Italie, qui autoliquide potentiellement), et la partie livraison de biens, qui peut constituer une livraison intracommunautaire taxée en Italie si vous remplissez les conditions pour une vente intracommunautaire exonérée de TVA française. Vous aurez alors deux lignes de facturation : l’une pour le SaaS en autoliquidation d’environ 300 euros mensuels, et l’autre pour la fourniture du scanner, potentiellement exonérée de TVA en France puis soumise à la TVA en Italie chez le client. Les formalités déclaratives (déclaration ECSL ou équivalent) s’appliqueront à la livraison de biens, tandis que la prestation de service devra être correctement renseignée dans votre déclaration européenne de services. Cette distinction est critique pour éviter toute double imposition ou omission de la part du fournisseur.
Exemple 4 : Vente de SaaS à un client hors UE
Vous avez décroché un contrat avec une société basée en Suisse. Vous lui vendez votre plateforme SaaS de comptabilité en ligne, hébergée sur des serveurs situés en France. Ici, la facture se fera hors TVA selon la règle d’exportation de services. Toutefois, vous devrez prouver que l’usage principal du service est en Suisse. Conservez les preuves de la localisation du client, telles qu’un contrat précisant les adresses, l’IP utilisée, ou toute autre confirmation solide. Dans certains cas, la Suisse peut exiger que vous vous immatriculiez pour la TVA helvétique si votre chiffre d’affaires global dépasse les seuils fixés par la législation locale. Tenez-vous informé, car de plus en plus de pays tiers imposent des obligations de taxe sur la consommation pour les prestataires étrangers de services électroniques.